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Les impayés relèvent du Juge des Contentieux de la protection. On distingue les dettes inférieures à 5 000 € de celles supérieures à 5 000 €.
Voici les procédures qui s’offrent aux propriétaires-bailleurs pour espérer récupérer leurs loyers ou obtenir l’expulsion d’un locataire qui ne paie plus.

1. Montants inférieurs à 5 000 €

1.1. La médiation, ou “Accord amiable pour éviter un procès civil”

Le décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019 réformant la procédure civile précise les cas dans lesquels le demandeur doit justifier, avant de saisir le tribunal judiciaire  d’une tentative de conciliation, de médiation ou de procédure participative, à peine d’irrecevabilité. Cliquer pour plus d’infos.

Cette tentative de médiation ou de recherche de solution amiable est obligatoire pour toute demande en justice pour un litige n’excédant pas 5 000 € .

Donc en cas d’impayé inférieur à 5 000 €, le propriétaire doit en premier lieu utiliser la médiation. Vous devez obligatoirement essayer la médiation dans un premier temps. Sinon, vous risquez de ne pas obtenir gain de cause si par la suite vous devez engager d’autres poursuites.

La médiation a pour but de trouver une solution à l’amiable. Si un accord est trouvé, le juge en est informé et il décide d’homologuer l’accord ou pas. Si l’accord est homologué, l’affaire est terminée et l’accord prend force exécutoire, tout comme un jugement. Si le juge n’homologue pas l’accord, il faudra alors enchaîner sur une procédure classique.

La conciliation est gratuite. Le médiateur est payé par le versement d’honoraires fixés par le juge. La procédure participative donne lieu au versement d’honoraires aux avocats. Dans tous les cas, pensez à demander si vous pouvez bénéficier de l’aide juridictionnelle ou de l’assistance juridique de votre assurance.

1.2. La procédure simplifiée par huissier

Elle concerne  les créances inférieures à 5 000 €, intérêts compris (article R125-1 du code des procédures d’exécution). La  procédure simplifiée est mise en œuvre par un huissier de justice à la demande du bailleur. Le bailleur peut soit :
– s’adresser directement à un huissier du lieu du domicile du locataire,
– ou faire un dépôt de dossier en ligne, sur la plateforme des petites créances credicys.fr .

Le débiteur (le locataire) reçoit une lettre recommandée l’invitant à participer à la procédure de recouvrement des sommes dues. Il a un mois pour répondre. Si le locataire ne répond pas, l’huissier lui transmet un formulaire d’acception. Ce formulaire indique que le locataire est d’accord pour participer à une procédure simplifiée.

A l’issue de cette procédure, si le locataire reconnait les sommes dues, l’huissier dresse un titre exécutoire équivalent à un jugement. Ceci permet les poursuites par tout moyen (saisies des biens et/ou saisies sur salaires). En général, cette procédure aboutit au remboursement de la dette par le locataire, auprès de l’huissier.

ATTENTION : si le locataire n’accepte pas cette procédure simplifiée dans le délai d’un mois, on dit qu’il y a échec de la procédure.

Cette procédure, dite gratuite, a tout de même un coût pour le propriétaire :
Dépôt du dossier chez l’huissier 14,92 euros,
Emission du titre exécutoire 30€,
Rémunération de l’huissier, de  21,45€ à 188€.

Soit au total entre 66,37 € et 232,92 €.
Les autres frais seront dus par le locataire, plus d’informations ici.

1.3. La procédure par requête

Si le montant de votre demande ne dépasse pas 5.000 €, vous pouvez saisir le tribunal judiciaire du lieu où se situe le logement loué. Pour connaître le tribunal compétent voici l’annuaire de la Justice.

Pour les loyers impayés, la procédure doit être introduite par une requête adressée au juge des contentieux de la protection. Vous pouvez donner votre accord en utilisant ce formulaire de consentement pour que la procédure se déroule sans audience.

Dans le cas contraire, une audience se tiendra et le juge entendra les explications des deux parties. Il pourra alors examiner le dossier complet. Souvent, l’action en paiement du loyer se double d’une action en résiliation du bail, en vue d’obtenir l’expulsion du locataire.

Le recours à un avocat n’est pas obligatoire devant le juge des contentieux et de la protection

La procédure en elle-même est gratuite mais les frais d’huissier ou d’avocat sont à la charge du propriétaire.

2. Montants entre 5 000 € et 10 000 €

2.1. L’injonction de payer

La loi de programmation et de réforme de la justice du 23 mars 2019 a décidé de confier à une juridiction nationale le traitement dématérialisé des injonctions de payer. L’entrée en vigueur de la réforme  est prévue au plus tard au 1er janvier 2021.
Pour l’instant, voici la marche à suivre.

La procédure d’injonction de payer permet d’obtenir rapidement le paiement d’une créance jusqu’à 10 000 euros. Ce recours est fréquent, notamment lorsque le propriétaire souhaite obtenir le paiement des loyers, sans toutefois expulser son locataire.

Il arrive qu’un locataire arrête de payer le loyer en expliquant que son propriétaire doit réaliser certains travaux ou réparations dans le logement. Ce locataire n’est pas forcément un mauvais payeur, on dit qu’il fait un refus de payer en mesure de rétorsion. Pour ce cas là, une injonction de payer peut suffire.

La requête est à adresser  au juge des contentieux de la protection qui peut siéger auprès du tribunal de proximité ou au tribunal judiciaire.(trouver le tribunal approprié).

Dans tous les cas, c’est le tribunal du domicile du débiteur (donc ici, le locataire) qui prendra en charge ce dossier. Pour cela, il faut utiliser le formulaire d’injonction auprès du greffe du tribunal. Pensez à joindre les pièces justificatives : bail, lettres de relance… Cette procédure est dite non-contradictoire, c’est-à-dire sans audience. Le juge rend sa décision au vu des seuls éléments fournis par le bailleur sans entendre les arguments du locataire indélicat.

Si le juge des contentieux et de la protection estime que la requête est justifiée, il rend une ordonnance portant injonction de payer pour la somme qu’il reconnaît être due. Le bailleur doit alors transmettre l’ordonnance d’injonction de payer au locataire par huissier de justice, à ses frais, au moyen d’une copie certifiée conforme de la requête et de l’ordonnance.

Attention ! L’ordonnance est annulée si la transmission n’est pas faite dans les 6 mois.

En revanche, si le juge rejette la requête, le bailleur ne dispose d’aucun recours. Alors, le bailleur peut engager une procédure judiciaire classique (cf paragraphe suivant).

Nota Bene :  via la procédure d’injonction de payer, il n’est pas possible de demander des dommages et intérêts.

Dans le mois qui suit la signification, le débiteur (le locataire) peut faire opposition. C’est-à-dire qu’il peut contester l’ordonnance par une lettre recommandée ou par une déclaration contre récépissé.

Chaque partie est alors convoquée devant le tribunal. Si le locataire n’émet pas d’opposition dans un délai de 1 mois, le propriétaire doit alors demander au greffe du tribunal d’apposer sur l’ordonnance la formule exécutoire. Le propriétaire dispose alors d’un titre exécutoire qui lui permet d’être payé par le biais d’un huissier.

Cette requête est gratuite. Par contre, le propriétaire devra s’acquitter des frais de signification d’huissier calculés selon le montant de la créance. Cela représente en général entre 100 et 150 euros.

2.2. La procédure par voie d’assignation

Obligatoire pour toute demande supérieure à 5.000 €

Pour toute demande qui excède 5.000 €, vous êtes obligés de rédiger une assignation, par voie d’avocat de préférence, mais ce n’est pas obligatoire. L’assignation sera délivrée à la partie adverse (le locataire) par huissier.

Le jour de l’audience, le juge donnera la parole aux deux parties ou à leurs représentants. N’oubliez pas alors d’être le plus concis possible en insistant sur un ou deux points qui vous paraissent essentiels. Lorsque le juge estime être en possession de tous les éléments nécessaires, il met l’affaire en délibéré et rend son jugement dans les semaines qui suivent.

Cette procédure est obligatoire afin de pouvoir ensuite saisir le juge des référés, qui est le seul compétent en matière d’expulsion.

Si vous voulez obtenir l’expulsion de votre locataire, il vous faut d’abord lui avoir fait délivrer un commandement de payer via un huissier, en lui laissant un délai de deux mois pour payer sa dette. Dans ce courrier, vous pouvez annoncer au locataire que s’il ne paie pas, le bail sera automatiquement résilié, entraînant de fait son expulsion.

Si au terme de ce délai de deux mois, votre  locataire n’a pas régularisé sa situation, vous devez saisir le Juge du contentieux et de la protection (J.C.P.) auprès du Tribunal Judiciaire en référé, par voie d’assignation pour obtenir une ordonnance d’expulsion (voir avec votre avocat ou avec l’aide juridictionnelle de votre assurance).

Cette ordonnance a trois effets :
– le locataire est condamné à payer les sommes dues
– le bail est résilié
– l’expulsion est prononcée.

Mais ce n’est pas encore terminé…
L’ordonnance sera ensuite notifiée par huissier au locataire qui disposera d’un délai d’un mois maximum pour faire appel. Passé ce délai, le locataire reçoit un commandement d’avoir à quitter les lieux par huissier. Il a deux mois pour obtempérer. Et ce n’est qu’ensuite que l’expulsion par la force est envisagée.

C’est donc toute une procédure à mener avec un huissier et souvent un avocat. Cette procédure dure au minimum entre 6 mois et 1 an. Et au maximum 18 mois.

C’est la raison pour laquelle il ne faut pas attendre mais au contraire engager la procédure rapidement, précisément pendant la trêve hivernale qui débute le 1er novembre pour s’achever le 31 mars.

Important : le recours à un avocat n’est pas obligatoire devant le juge des contentieux et de la protection.

Pour conclure

En cas d’impayé, n’hésitez pas à vous adresser rapidement à l’aide juridictionnelle de votre assurance, ou à votre avocat si vous en avez déjà un dans vos contacts.

Et avant d’engager toute procédure écrite, pensez à indiquer à votre locataire, par oral, que vous avez 30 ans pour récupérer vos dettes et que donc, même s’il ne paye pas aujourd’hui, vous saurez relancer la procédure dans quelques années, avec retenue possible sur salaire.

Sources : pap.fr et service-public.fr.